Il est des moments où la passion, au lieu d’enflammer la liberté, finit par l’étouffer. En politique comme dans la vie, l’excès d’amour pour une idée ou un homme peut devenir une forme d’enfermement. Ce qui devait unir finit alors par diviser. Ce qui devait éclairer, aveugle.
L’extrémisme, ce vice de l’esprit, gangrène aujourd’hui nos débats. Certains esprits congestionnés veulent capsuler l’opinion, réduire la pensée à une couleur, à un camp, à un cri. Comme si penser autrement était un crime. Comme si la démocratie n’était qu’un champ de bataille où triompher revient à faire taire.
D’un côté, on t’exclut si tu soutiens la candidature du Général Mamadi Doumbouya. De l’autre, on te bannit si tu ne le fais pas. Deux camps, un même travers : confondre loyauté politique et dévotion aveugle. La démocratie, pourtant, ne se nourrit pas de serments d’allégeance, mais de débats féconds, de critiques constructives, d’idées qui s’entrechoquent pour faire jaillir la lumière.
Nous oublions trop souvent que la démocratie n’a qu’un prince sacré : la liberté d’opinion. C’est elle qui garantit la dignité de l’homme libre, c’est elle qui empêche la pensée unique de s’installer. Car le silence des consciences est toujours le prélude à la tyrannie.
En politique, surtout chez nous en Guinée, le choix n’est pas toujours entre le bien et le mal, mais souvent entre le préférable et le détestable. C’est dans cette nuance que se loge la maturité démocratique. Apprendre à choisir sans haïr, à soutenir sans idolâtrer, à contester sans détruire.
L’engagement véritable n’est pas celui qui crie le plus fort, mais celui qui élève le débat. Il ne s’agit pas d’aimer ou de détester un homme, mais de défendre une vision du pays, une espérance commune. Le patriote, le vrai, ne confond jamais sa cause avec sa colère.
Alors, engage-toi. Défends tes convictions. Sois passionné, oui, mais que ta passion reste lucide. Car la démocratie ne se construit ni dans la ferveur fanatique, ni dans le dénigrement systématique, mais dans l’équilibre entre le cœur qui aime et la raison qui éclaire.
Que la Guinée demeure ce havre de paix où la justice, la sagesse et la tolérance tracent la route — non pas des clans, mais de la conscience.
Car une nation ne se sauve pas par la force des cris, mais par la noblesse des idées.
Abdourahamane Nabé
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