Ma Guinée encore dans l’œil du cyclone !
Ma Guinée à la croisée des chemins !
Ma Guinée qui « aime » manquer les grands rendez-vous de son histoire. Ma Nation que j’aime bien ! Où sont tes repères nationaux de notre histoire récente !
Pourquoi on les ignorent, au moment où il faut aller les chercher.
On a dévoilé les membres du CNT sans les repères en majorité dans cette transition pourtant voulue douce ? Où sont les personnes ressources fiables ?
Pourquoi nous voulons réinventer les roues de l’histoire ?
Le CNT a pour mission entre autres, le suivi et la mise en œuvre de la feuille de route de la transition mais aussi de contribuer à la réconciliation nationale. (Voir les articles 56 et 57 de la Charte)
Peut-on réussir ces missions sans les sages en majorité dans le CNT. Je veux bien les jeunes mais quels jeunes ?
Les jeunes bien formés, bien préparés, ayant pris part dans la gestion d’un processus de ce genre pour relever les défis oui ! Le président ALPHA CONDE ne s’est-il pas noyé dans le fleuve à cause des 518 (Cinq cent dix-huit) jeunes que je relativise bien sûr.
Prenons les deux extrêmes qui défraient la chronique mondiale.
Le président Macron qui avait la trentaine quand il venait au pouvoir en France, et le Président Joe Biden qui est venu au pouvoir à 72 ans aux USA.
Le Président Macron, c’est l’exception de la règle, un jeune qui a charmé les français avec son projet de société et a réussi à défier les politiciens classiques : voilà les motifs de son élection.
Le Président Joe Biden, dont nous connaissons le contexte d’accession au pouvoir, le Président Trumpe qui avait foulé au sol, la grande réputation des États Unis ; c’est pourquoi L’Amérique était à la recherche d’une forte personnalité pour restaurer son image entamée.
Dans tous les cas, le CNT avait besoin à sa tête dans le contexte guinéen, une forte personnalité consensuelle. Son expérience pouvait être utile, ses charges de grand commis de l’État, l’éclat de sa fonction passée rejaillit sur l’institution et assure à l’institution non seulement sa crédibilité mais aussi son efficacité.
Je ne nie pas qu’au sein du CNT, il n’y a pas des jeunes talentueux qui sortent du lot capables d’animer mais qui peuvent toujours être mis en minorité pour celui qui connait comment les décisions sont prises au sein de ce collège. Au demeurant, nous pouvons conclure que la peur et la méfiance à l’endroit des anciens qui sont peu manipulables et l’espoir que les jeunes sont plus fragiles à une telle opération ont fini par remporter chez les décideurs.
Les questionnements ne finissent jamais dans une société en crise à la recherche de l’oiseau rare qui tarde à venir. En un mot, le rejet des anciens dans le contexte guinéen ne cache-t-il pas des intentions inavouées.
Indéniablement, l’opinion nationale se pose beaucoup de questions qui restent pour le moment sans réponse.
« Puis qu’il n’y a plus de distinctions, chacun peut prétendre à tous les honneurs et à toutes les places ! »
Si le meilleur ne peut plus être établi, comment peut-on s’assurer contre le mauvais choix ? Telle est l’énigme de notre pays en transition : les anciens critères n’y sont plus acceptés tandis que les nouveaux tardent à régner sur les consciences.
En tout état de cause, « les Guinéens attendent désormais ici et maintenant, un Etat fort et rassurant, capable de les protéger contre les déprédateurs, contre l’arbitraire et qui leur montrera le chemin qu’ils veulent emprunter, celui du développement. » Eh oui ! Notre refondation prend des coups.
– LA REFONDATION PREND DES COUPS
La refondation prônée par le CNRD le 5 Septembre 2021 prend des coups. La mise en place tardif du CNT a fait qu’on nous a doté une « Charte d’en haut » qui n’était pas du tout souhaité par les guinéens dans le contexte de la transition, alors qu’il fallait éviter les erreurs du passé.
L’histoire est vraiment têtue, les guinéens n’ont jamais connus les rédacteurs de la constitution de 2020; mais ils n’ont pas non plus aussi connus les rédacteurs de la Charte du 27 Septembre 2021. ‘’La Charte d’en haut’’, elle n’intègre pas tous les segments sociétaux, elle n’intègre pas non plus les préoccupations de toutes les parties prenantes. Et donc elle rime l’inconfort. Le pays avait besoin d’une ‘’Charte d’en bas’’.
La ‘’Charte d’en bas’’ c’est ce véritable contrat qui allait lier les détenteurs du pouvoir, c’est-à-dire les membres du CNRD et toutes les parties prenantes de la transition. Donc une charte qui émane du consensus des acteurs de la transition, négociée par toutes les parties prenantes et opposables aux gouvernants. En effet le premier coup qu’elle prend, c’est la légitimé contestée avec le recul.
La légitimé du CNT est entamée, certaines parties prenantes pensent qu’il faut obligatoirement créer un cadre de concertation composé des membres du CNRD, les représentants des partis politiques et les représentants de la Société Civile Pour définir:
Le délai de la transition ;
Le calendrier ou le chronogramme de la transition.
Au-delà de ce que cela représente comme élément négatif pour notre transition, il y a là un aveu de taille, une perte de légitimité décelée qui rejaillit sur la Charte et le CNT. Dans une transition consensuelle et respectable, un tel coup aurait incité le détenteur du pouvoir à s’amanger une porte de sortie honorable ou à s’engager dans des concertations qui intègrent les préoccupations de toutes les parties prenantes en vue de la reconquête de la légitimité qui s’effrite en longueur de journée.
LE DEUXIÈME COUP DUR, c’est que, un pan important des institutions Républicaines qui sont des acquis du processus de démocratisation amorcé en 2007-2008 est presque enterrées par la transition. Ces institutions ont été dissoutes d’entrée de jeu par principe des coups-d’ États. C’est bien vrai puisque les hommes qui les incarnaient, les ont prostituées.
En somme, les hommes qui étaient à la tête des institutions dissoutes ont posé des actes pendant la gouvernance du Président Alpha qui ont conduit le pays dans des crises indescriptibles.
Par ailleurs, quand les autorités de la transition ont octroyé la charte, il fallait faire renaitre toutes les institutions dissoutes sous un autre visage pour expérimenter la bonne gouvernance des Institutions Républicaines pendant la transition.
La période de la transition allait constituer l’école de l’apprentissage des institutions qui ont mal fonctionné pendant le règne du Président Alpha Condé. En ce moment, l’école de la refondation initiée par le CNRD allait faire tâche d’huile et allait léguer en plus à la République, la bonne pratique du fonctionnement des institutions.
Ce qui ne faut pas en plus passer sous silence, c’est que les réformes initiées au sein de l’Administration sont brutales, il y a de l’amateurisme, à l’amont, il n’y a pas eu d’études appropriées pour évaluer les avantages et les inconvénients dans les prochaines dix années, de qu’est-ce qui va devenir notre Administration ?
La retraite massive des fonctionnaires engagés emporte avec elle toute la crème de notre Administration et l’importation massive des cadres venus de partout, sans expérience dans les différentes structures de notre Administration donne à réfléchir pour l’avenir de notre pays. Les autorités de la transition veulent toucher à tout alors qu’ils n’en-ont pas pour longtemps.
Il serait judicieux, voir opportun de s’atteler essentiellement à assainir notre économie par la récupération des biens de l’État, la lutte contre le détournement des deniers publics et la mauvaise utilisation de nos ressources à tous les niveaux. En priorité en plus de ce secteur économique, doter le pays d’une constitution consensuelle et organiser les élections.
Ces priorités suffisent valablement pour une transition réussie.
LE TROISIÈME COUP DUR est que la transition guinéenne est sans arbitre, ce qui fait qu’il n’y a pas de dialogue franc et sincère entre les parties prenantes de la transition.
À l’entame de la transition le 5 Septembre 2021, on a rejeté tout arbitrage avec l’argument affiché qu’il n’y a pas de crise en Guinée. Mais contre toute attente, plus les choses évoluent plus la nécessité se fait sentir de mettre tous les acteurs de la transition autour d’une table de concertation avec bel et bien un arbitre qui n’est pas partie prenante.
Cette tribune est une contribution à la réussite de la transition. Ce n’est pas une critique. Personne ne souhaite que cette transition échoue, si elle échoue, c’est toute la Guinée qui a échouée. Seulement nous souhaitons que les choses soient présentées telles quelles sont et que les autorités de la transition soient à l’écoute du peuple pour « éviter les erreurs du passé », un discours avec lequel le Président MAMADY DOUMBOUYA a toujours bercé les guinéens.
Fayimba MARA, Doctorant à l’Université Cheichk Anta-Diop de Dakar
Juriste Constitutionnaliste
Conakry le 12 Février 2022