Un jour seulement après la rentrée scolaire officielle en Guinée, le Syndicat Libre des Enseignants et Chercheurs de Guinée (SLECG) tire la sonnette d’alarme. Contacté ce mardi 7 octobre, son porte-parole Mohamed Bangoura, alias Roméo, a dénoncé une pénurie « critique et injustifiable » d’enseignants à travers tout le pays, mettant en cause l’inaction gouvernementale et des choix de recrutement contestés.
Initialement prévue pour le 15 septembre, la rentrée a été reportée au 6 octobre à la suite d’alertes syndicales : « Vous aurez constaté avec nous, malgré que nous avons alerté le gouvernement que la réouverture des salles de classe pour le 15 septembre 2025 n’était pas facile. Nous avons lutté et Dieu merci, l’école et la réouverture furent reparties au 6 octobre 2025 », a rappelé Mohamed Bangoura.
Mais malgré ce délai supplémentaire, les difficultés persistent. Des élèves ne sont toujours pas en classe, en partie, selon le syndicat, à cause d’un désengagement parental : « Quand un parent, en sortant tôt le matin, constate encore la présence de ses enfants dans le lit, tout point à croire que lui-même, quelque part, a démissionné de sa responsabilité », déplore-t-il.
Le cœur du problème reste cependant l’insuffisance dramatique de personnel enseignant. Le ministère de l’Enseignement pré-universitaire a lui-même reconnu un manque de 18 000 enseignants: « Il faut remercier le ministère qui a osé dire publiquement que sur toute l’étendue du territoire national, l’école de la République a un besoin de 18 000 enseignants », a souligné Roméo.
Pour le SLECG, cette reconnaissance est une aubaine pour réclamer une réponse immédiate : « Même si on recrutait ces enseignants, peut-être que l’on allait se retrouver avec un besoin de 2 000 ou 3 000 enseignants encore manquants ».
Le syndicat appelle à l’intégration rapide des enseignants contractuels non retenus lors du dernier recrutement, notamment ceux de la zone spéciale de Conakry et des communes de l’intérieur : « Puisque nous avons déjà sous la main des enseignants aguerris, expérimentés et capables de tenir les salles de classe, il faut
commencer par les recruter, leur donner les emplois du temps, les redéployer », insiste-t-il.
Autre point de discorde : l’âge limite fixé lors du dernier concours : « 10 000 enseignants ont été recrutés pendant que certains ont été recalés sous prétexte qu’ils avaient atteint 40 ans, oubliant que c’est dans ces salles de classe qu’ils ont atteint les 40 ans », s’indigne Roméo.
Selon lui, exclure ces profils revient à ignorer une main-d’œuvre qualifiée, déjà opérationnelle. Le SLECG appelle à une collaboration étroite entre le ministère de l’Enseignement pré-universitaire, le ministère du Travail, de la Fonction publique et l’intersyndicale de l’éducation. Objectif, éviter toute tentative de favoritisme dans les recrutements : « Il faut empêcher que les présidents, les délégations spéciales ou les préfets profitent de cette situation pour insérer leurs progénitures ou leurs plus proches parents », avertit le syndicaliste.
Enfin, s’il reconnaît l’avancée des négociations sur un statut particulier pour les enseignants, Mohamed Bangoura rappelle la priorité absolue : « L’urgence d’abord, c’est de régler ce problème de manque d’enseignants. Sans enseignants, pas d’école ». Pour lui, si rien n’est fait rapidement, « les cours seront boycottés et les examens nationaux ne seront pas dignes de nom ».
Gnima Aïssata Kébé