Pour tenter d’apporter des réponses à cette épineuse et pertinente question, nous allons essayer d’appréhender le phénomène sous deux aspects : sur les dispositions juridiques (législatives) relatives aux Partis politiques (1) et au souci récurrent de la refonte du système électoral avec pour option le scrutin majoritaire à un tour appliqué à toutes les élections dans notre pays (2).
En effet, la prolifération des Partis politiques sans assise, sans programme de société, créés du simple fait du fondateur pour accéder, comme dirait l’autre, au partage du gâteau national, obstrue la nitescence de nombreux partis politiques dans notre pays.
Le paysage politique guinéen compte à ce jour 181 Partis. Cependant, la plupart d’entre eux sont des coquilles vides sans véritable projet de société et sans aucune possibilité de prendre part aux différentes élections nationales.
En plus du fait qu’ils se résument souvent aux présidents-fondateurs et aux membres des familles de ces derniers, d’aucuns de ces Partis politiques n’ont pas de siège, ni même de secrétariat.
La véritable question qui se pose aujourd’hui est de savoir comment mettre fin à ce désordre dans l’arène politique guinéenne ?
Depuis l’avènement de l’armée au pouvoir le Dimanche, 5 septembre 2021, sous l’étendard du Conseil National du Rassemblement pour le Développement (CNRD), nombre de guinéens qui préfèrent le bipartisme au multipartisme, ne cessent de demander aux nouvelles autorités d’imposer le système de deux Partis à la classe politique, à travers notamment une loi.
Selon les apôtres de ce courant d’idée, ce système de deux Partis, en plus de faciliter l’alternance, pourrait drastiquement alanguir les replis identitaires et permettre à notre patrimoine commun de transcender les clivages politiques infructueux.
Il est bien évident qu’en se rabattant sur le droit, des arguments en faveur du bipartisme pourraient être trouvés pour sortir notre pays de ce multipartisme sans limite qu’il connait depuis les années 1990. Mais, force est d’admettre que dans la pratique l’instauration du bipartisme dans un pays comme le nôtre où beaucoup voient le terrain politique comme étant une opportunité de faire fructifier leurs business et de se faire une place au soleil, sera très difficile pour ne pas dire utopique.
Néanmoins, deux approches de solutions pourraient permettre d’encadrer cette question de pluripartisme misanthrope qui est l’une des véritables sources actuellement de l’émiettement du tissu social dans notre pays, à savoir :
1-L’introduction d’une loi ne donnant le droit d’exister qu’aux deux formations politiques venues en tête d’un scrutin
La loi peut, sans détour, agir sur le nombre des formations politiques en excluant la représentation des Partis n’ayant pas obtenu un minimum de voix.
En effet, une volonté politique peut par exemple introduire une loi qui disposera formellement que les deux formations politiques qui arriveront en tête d’un scrutin, seront les seules habilitées à exister en Guinée. Mais, la probabilité que cette méthode échoue est très élevée, car il est très difficile voire chimérique de vouloir cantonner les choix des citoyens.
2-La réforme du système électoral ou l’application du scrutin majoritaire à un tour à toutes les élections dans notre pays
Ce procédé, bien qu’il exclut ou limite la représentation des candidats minoritaires, incite les Partis politiques, surtout dans un pays comme le nôtre où il y a plusieurs groupes ethniques ou régionaux, à agrandir leur base, à regrouper plusieurs composantes de la société.
Clairement, la mise en place d’un système de deux Partis réside dans l’application du scrutin majoritaire à un tour (caractérisé par la victoire du ou des candidats qui obtiennent le plus de suffrages) à toutes les élections dans notre pays. De cette façon, les Partis minoritaires mourront d’eux-mêmes.
Pour beaucoup d’autres guinéens par contre, imposer le bipartisme par une loi serait une restriction à la liberté de choix de l’électeur. Mais, sauf que dans les faits, il existe dans notre pays un bipartisme qui ne dit pas son nom depuis plus d’une décennie : le RPG Arc-En-Ciel et l’UFDG viennent toujours en tête des scrutins.
En un mot tout comme en mille, toujours est-il que la liberté de création des formations politiques doit être rigoureusement encadrée pour éviter l’éclosion continue des Partis politiques factices dans notre pays, qui ne brillent que lorsqu’il s’agit d’un « share the cake ».
Sayon Mara, Juriste