L’Association des Victimes, Parents et Amis du 28 septembre (AVIPA) a pris part à la conférence de presse organisée par les défenseurs des droits de l’homme à la maison de la presse, ce dimanche 28 septembre 2025; marquant ainsi le 16e anniversaire du massacre du 28 septembre 2009.
Lors de cette commémoration, Asmaou Diallo, présidente de l’AVIPA, a rappelé les horreurs vécues par les victimes de ce massacre, soulignant l’ampleur de la tragédie qui reste ancrée dans l’histoire du pays : « Plus de 150 personnes ont été tuées, plus de 100 femmes ont subi des violences sexuelles parmi les plus atroces, et des centaines d’autres ont été blessées, arrêtées et humiliées. Ce massacre n’est pas seulement une page sombre de notre histoire récente, c’est un crime contre l’humanité. C’est un moment où l’État, qui devait protéger ses citoyens, s’est transformé en bourreau ».
L’ouverture du procès en 2022, après 13 ans d’attente, a marqué un tournant décisif dans la quête de justice pour les victimes. En juillet 2024, huit responsables militaires et politiques, dont l’ex-président Moussa Dadis Camara, ont été condamnés pour crimes contre l’humanité. Cependant, selon l’AVIPA, cette avancée reste insuffisante.
« Nous devons le reconnaître, ce procès a constitué une avancée historique pour la première fois en Guinée. Des responsables de haut niveau ont été jugés pour des crimes aussi graves. C’est une victoire partielle, obtenue grâce à la détermination sans faille des victimes et au courage des survivants. Mais cette victoire est marquée par de sérieuses insuffisances. Pour plus de 730 victimes constituées parties civiles, et plus de 450 victimes auditionnées par les juges, seules 334 ont été mentionnées dans la décision de justice. Cela signifie que des centaines de victimes reconnues dans la procédure ont été invisibilisées dans le jugement final. Ce fait est douloureux, incompréhensible et injuste« .
L’AVIPA a également exprimé son incompréhension face à la décision de grâce présidentielle accordée à Moussa Dadis Camara en mars 2025. Cette décision, prise en pleine procédure d’appel, a ravivé la douleur des victimes et a semé le doute sur la crédibilité du processus judiciaire.
« En mars 2025, la grâce présidentielle accordée à Moussa Dadis Camara a été vécue comme un véritable choc par les victimes. Une décision politique prise en pleine procédure d’appel qui envoie un signal d’impunité et remet en cause la crédibilité même du processus judiciaire« .
Dans ce contexte, l’AVIPA a formulé trois appels urgents à l’attention des autorités guinéennes, de la communauté internationale et des victimes elles-mêmes. « Aux autorités guinéennes, nous demandons d’organiser sans délai le procès en appel. Il est urgent que la justice aille au bout de son travail de manière transparente et équitable. Revoyez le processus de réparation de manière inclusive et juste. Chaque victime reconnue doit bénéficier de ses droits sans discrimination. Il est également impératif de protéger les victimes, les témoins et les défenseurs des droits humains, dont la sécurité est essentielle à la bonne marche de la justice« .
L’AVIPA a également insisté sur l’importance de l’implication continue de la communauté internationale : « Aux Nations unies, à l’Union africaine, à l’Union européenne et à nos partenaires bilatéraux, nous appelons à exercer une pression constante sur la Guinée pour qu’elle respecte ses engagements en matière de justice et de droits humains. Ne laissez pas ce procès historique devenir un symbole d’échec, mais au contraire un exemple de persévérance et de solidarité internationale contre l’impunité ».
Enfin, l’AVIPA a réaffirmé son soutien indéfectible aux victimes et à leurs familles. « Aux victimes et à leurs familles, l’AVIPA reste à vos côtés, déterminée à poursuivre le combat pour que vos souffrances soient reconnues, vos droits respectés et vos vies réparées ».
La présidente de l’AVIPA a conclu son intervention en insistant sur l’importance de la mémoire et du combat pour la justice : » Le 28 septembre est et restera une journée de mémoire, mais c’est aussi une journée de combat pour nos martyrs, pour nos survivants, pour la Guinée et pour l’humanité tout entière. La justice est longue et difficile, mais elle est inévitable lorsqu’elle repose sur la vérité et la détermination des victimes« .
Gnima Aïssata KÉBÉ