Le président du Rassemblement pour la Renaissance et le Développement (RRD), Abdoulaye Kourouma, a pris la parole ce lundi pour livrer sa lecture de la situation sociopolitique guinéenne, à la veille d’un tournant crucial pour le pays : la tenue d’un référendum constitutionnel.
Face à la presse il a articulé son discours autour de trois axes majeurs : la nécessité d’un retour à l’ordre constitutionnel, la responsabilité citoyenne face au vote, et l’appel à une administration neutre et respectueuse de l’esprit républicain.
Pour le président du RRD, la consultation référendaire annoncée ne doit pas être perçue comme un enjeu partisan, mais comme une exigence de normalisation politique. Il affirme avec conviction : « Voter est un droit. Ne pas voter en est un aussi. Mais nous appelons chacun à s’exprimer selon sa conscience, sans consigne de vote de notre part. »
Sans donner de mot d’ordre à ses militants, Abdoulaye Kourouma insiste sur le fait que le peuple guinéen doit retrouver sa souveraineté juridique à travers une constitution stable, légitime, et acceptée. Car, rappelle-t-il avec amertume, la Guinée est le seul pays de la sous-région à avoir connu trois constitutions en seulement quinze ans.
Abdoulaye Kourouma soulève une interrogation fondamentale : la crise guinéenne est-elle réellement constitutionnelle ou réside-t-elle dans l’incapacité des hommes à appliquer la loi ? : « Ce n’est pas tant un problème de constitution qu’un problème de ressources humaines. Nous avons un sérieux déficit d’hommes d’État conscients et respectueux des lois. »
Ce constat l’amène à rejeter fermement l’instrumentalisation politique de l’image du président de la République dans cette campagne référendaire. Pour lui, la consultation ne doit en aucun cas devenir une compétition électorale déguisée : « La constitution n’appartient ni à un individu, ni à un président. Elle est notre vivre-ensemble. »
L’appel de Kourouma va au-delà de son propre parti. Il interpelle l’administration publique, l’invitant à se consacrer à l’explication du contenu de la constitution, et non à en faire la promotion à travers la figure du président : « Si chaque ministère prenait deux articles de la Constitution et les expliquait dans chaque sous-préfecture, le peuple serait mieux informé. »
Sur le plan politique, Abdoulaye Kourouma n’a pas manqué de dénoncer l’exclusion de certains partis majeurs du jeu politique actuel. Il souligne qu’au sein des 125 partis reconnus, seuls trois à quatre ont réellement participé à toutes les élections majeures depuis la transition démocratique : communales, législatives et présidentielles.
« Ce sont ceux qui mobilisent, qui ont une assise réelle, qui sont marginalisés au profit de partis fabriqués et sans base. »
Il remet en question la crédibilité du paysage politique et interpelle sur les manœuvres d’affaiblissement des partis historiques, qui participent à la fragilisation du processus démocratique.
Dans une envolée pleine de gravité, Kourouma appelle les responsables en charge de l’organisation des élections à prendre la mesure historique de leurs actes : « Ce ne sont pas des Congolais ou des Burkinabè qui vont organiser les élections. Ce sont des Guinéens. Et l’Histoire est têtue : ce que vous ferez aujourd’hui sera enseigné à vos enfants. »
Enfin, Abdoulaye Kourouma rappelle que le référendum n’est pas une fin, mais un début. Celui du retour à la normalité institutionnelle, préalable indispensable à des élections légitimes à venir communales, législatives, et présidentielles.
« On ne peut pas rester dans la normale. Il faut aller vers la normalité. Et cela commence par le vote d’une constitution. »
Gnima Aïssata Kébé