Dans la nuit du 30 juillet, Conakry s’est noyée. Encore. Mais au-delà des flaques, des murs effondrés, des maisons inondées et des cris dans l’obscurité, il y a cette question : combien de fois devrons-nous vivre ce cauchemar pour comprendre que les inondations ne sont pas une malédiction du ciel, mais une punition de la terre ?
La pluie est naturelle. Les dégâts, eux, sont humains. Et, plus précisément, institutionnels et comportementaux.
Chaque année, on enterre les morts. On balaie les rues. On promet. Puis on oublie.
On accuse le ciel, alors que le vrai coupable, c’est notre incapacité à faire respecter les règles d’urbanisme, notre tolérance complice à l’anarchie bâtisseuse, notre indifférence face aux caniveaux bouchés de plastique et de fatalisme.
Je le dis avec colère, mais aussi avec responsabilité : nos habitudes tuent.
Quand on jette nos ordures dans les caniveaux, on creuse des tombes.
Quand on construit sur les zones d’évacuation des eaux, on fabrique des pièges mortels.
Quand on tolère l’empiètement sur les bras de mer, on joue avec la vie des autres.
Quand on ne met pas en place un système cohérent de collecte, de tri et de recyclage, on abandonne la ville à elle-même.
Et quand on pense que c’est uniquement le civisme du citoyen qui est en cause, on passe à côté de l’essentiel.
L’incivisme est visible. L’inaction des décideurs, elle, est structurelle. Et elle coûte plus cher, humainement et économiquement.
Exiger un changement de comportement sans offrir un cadre structuré, c’est comme exiger la nage à ceux qu’on jette dans le fleuve sans leur apprendre à flotter. **Les responsabilités doivent être partagées, mais les responsabilités institutionnelles doivent être assumées.
Il est temps d’agir. Vraiment. Il faut sanctionner les contrevenants. Il faut déguerpir, réaménager, planifier, éduquer, anticiper.
Pas seulement quand les corps flottent. Pas seulement quand les réseaux s’indignent. Mais dès maintenant.
Nous ne pourrons pas toujours accuser les pluies. Un jour, il faudra bien affronter notre reflet dans l’eau trouble.
Abdourahamane Nabé, Responsable RSE
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