Face à une crise de liquidité persistante qui menace la stabilité économique du pays, le Premier ministre guinéen, Amadou Oury Bah, a annoncé ce vendredi 20 juin, une mesure décisive : l’interdiction totale des paiements en espèces à la Primature à partir de la fin du mois de juin. Cette décision, prise en marge d’une session de travail consacrée aux priorités gouvernementales pour l’année 2025, marque le coup d’envoi d’une réforme plus large de la gestion financière de l’État.
Devant des Secrétaires généraux, de Conseillers principaux et de responsables des Bureaux de Stratégie et de Développement (BSD), le chef du gouvernement a identifié les paiements en cash comme l’un des facteurs aggravants de la crise monétaire actuelle: « Désormais, il faut systématiquement éviter les règlements en cash. Les virements bancaires doivent devenir la norme », a-t-il déclaré.
Cette directive signifie qu’aucun salaire, prime ou dépense courante ne pourra plus être versé en espèces au sein de la Primature. Les transferts bancaires s’imposent désormais comme la seule méthode autorisée : « Si vous ne pouvez pas décaisser correctement, vous ne pourrez pas exécuter vos missions », a insisté Amadou Oury Bah, liant directement rigueur budgétaire et performance administrative. Il a également appelé chaque entité publique à revoir ses mécanismes de décaissement afin de les aligner sur des standards modernes et bancarisés.
L’un des objectifs centraux de cette réforme est de limiter le recours à l’émission monétaire excessive, un phénomène que le Premier ministre a qualifié de dangereux pour l’économie nationale : « Faire tourner la planche à billets en permanence coûte cher et met en péril notre économie », a-t-il averti, soulignant les pressions croissantes exercées sur la Banque centrale pour satisfaire les besoins en liquidités.
Au-delà de la réforme technique, Amadou Oury Bah appelle à une transformation profonde des pratiques et des mentalités dans la gestion publique. Citant les principes classiques de l’économie, il a rappelé que la vitesse de circulation monétaire est un facteur déterminant dans la création de richesse : « Tant qu’on continuera à faire circuler des sacs d’argent, notre économie restera bloquée. Un franc bien investi peut en générer dix », a-t-il signalé
Il a par ailleurs dénoncé certaines pratiques persistantes dans les établissements publics, où d’importants virements sont systématiquement retirés en espèces, vidant ainsi le circuit bancaire et freinant les effets multiplicateurs de l’investissement.
Enfin, le Premier ministre a invité à une réflexion collective sur l’organisation actuelle des circuits de financement, notamment la centralisation via le Trésor public : « Est-ce que tout faire passer par le Trésor est la solution ? Peut-être que oui, peut-être que non. Je laisse la porte ouverte, mais il faut qu’on se questionne », a-t-il conclu.
Gnima Aïssata Kébé