Initialement attendu ce mercredi 16 avril 2025, le verdict dans l’affaire opposant l’ancien ministre Ibrahima Kourouma et Mohamed V Sankhon à l’État guinéen a de nouveau été reporté. La chambre de jugement de la CRIEF (Cour de répression des infractions économiques et financières) a renvoyé sa décision au 7 mai prochain, au grand dam de la défense.
Un renvoi que Maître Almamy Samory Traoré, conseiller juridique d’Ibrahima Kourouma, n’a pas manqué de critiquer. Pour lui, cette nouvelle échéance est le signe d’une volonté manifeste de maintenir son client en détention.
« En temps normal, on ne devrait pas s’étonner que le juge prolonge en délibéré lorsque la décision n’est pas rédigée. Parce qu’il leur faut du temps pour rédiger. Mais, pour ce cas particulier, moi j’ai un sentiment de déception. Déception parce que nous estimons que tous les éléments sont réunis dans ce dossier, pour que les clients puissent être situés sur leur sort aujourd’hui. Pour l’autre, le délibéré ne va continuer qu’à endurcir la peine. Mais je vais simplement faire une mise en garde, parce que toute décision qui sera dictée, sera dénoncée. Parce que, ce que nous avons remarqué ici à la CRIEF, pour toutes les procédures qui concernent les anciens dignitaires de l’État, la chambre du jugement qui a jugé ces deux personnes, que ce soit Kassory, que ce soit Damaro, que ce soit Dr Mohamed Diané, toutes les peines qui ont été proposées par le parquet spécial ; la chambre du jugement a systématiquement reconduit les mêmes peines. On ne change même pas de virgule. On a l’impression que ces peines ont été dictées ailleurs. Le parquet donne l’information et le juge intervient. Nous mettons en garde contre cette systématisation de prononciation des peines concernant les mêmes personnes, qui sont poursuivies dans les mêmes situations », a-t-il dénoncé.
Concernant le report du verdict au 7 mai, l’avocat reste sceptique sur les intentions de la cour, mais dit garder espoir quant à une issue favorable, si l’indépendance du juge est respectée.
« Nous sommes très déçus parce que jusqu’au 7 mai, la peine qui est celle de M. Kourouma va continuer également à perdurer. Dans ce dossier, c’est très simple : M. Kourouma est jugé, au même titre que son co-prévenu, sous la base d’un rapport qui n’est pas contradictoire, un rapport provisoire. Les inspecteurs sont venus ici, ils disent non, qu’ils n’ont pas pu entendre le prévenu, donc ils n’ont pas eu le droit de faire le contradictoire. Le juge, en tant qu’organe indépendant — en tout cas, c’est ce que dit le code de procédure pénale, mais également le statut de magistrat — doit tirer les conséquences de cela. Pourquoi on ne veut pas libérer Ibrahima Kourouma ? Pourquoi on ne veut pas écarter le rapport ? Donc nous, nous considérons que ce rapport-là, c’est non seulement faire perdurer la détention de l’hôte, mais deuxièmement, c’est qu’on veut trouver un moyen pour le condamner ou pour justifier la peine que le parquet avait infligée. Nous estimons qu’ils ont eu suffisamment de temps, plus d’un mois, pour pouvoir le libérer. Mais nous sommes confiants, s’ils font preuve d’indépendance et au dire de la règle du droit, je pense que notre client sera libre », a espéré Maître Almamy Samory Traoré.
Pour rappel, Ibrahima Kourouma, ancien ministre de l’Enseignement pré-universitaire et de l’Alphabétisation sous le régime d’Alpha Condé, et Mohamed V Sankhon, directeur administratif et financier, sont poursuivis pour détournement de deniers publics et enrichissement illicite.
Gnima Aïssata Kébé