Une montée inquiétante des discours identitaires.
La Guinée traverse une période où les débats citoyens, au lieu de se focaliser sur les défis économiques et sociaux, sont souvent pollués par des discours identitaires clivants. L’appartenance ethnique devient, pour certains, un critère de positionnement politique, reléguant au second plan les compétences et les idées.
Cette dérive constitue un frein majeur au progrès collectif et menace dangereusement l’unité nationale. Si rien n’est fait pour inverser la tendance, la fracture sociale pourrait s’aggraver, avec des conséquences désastreuses sur la cohésion et la stabilité du pays.
Quand l’ethnie supplante le mérite et la compétence.
Il est essentiel de rappeler que personne ne choisit son origine. Être Peul, Malinké, Soussou, Forestier ou d’une autre communauté guinéenne ne confère aucun mérite particulier. Pourtant, certaines personnes exploitent leur appartenance ethnique comme un levier de positionnement, prétendant défendre leur communauté alors qu’en réalité, ils l’instrumentalisent à des fins personnelles.
Ce phénomène profite avant tout aux politiciens en manque d’idées, qui préfèrent manipuler les émotions des citoyens au lieu de proposer des solutions concrètes aux problèmes de gouvernance, d’éducation, de santé ou d’économie. L’ethnicisation du débat public devient ainsi un écran de fumée, détournant l’attention des véritables enjeux.
Les risques pour la stabilité nationale.
L’histoire récente de plusieurs pays africains rappelle à quel point l’instrumentalisation de l’ethnicité peut être destructrice. Une nation qui se divise sur des bases identitaires fragilise son tissu social et devient vulnérable à l’instabilité politique et aux conflits internes.
En Guinée, les discours clivants se propagent facilement, notamment sur les réseaux sociaux, où l’anonymat encourage les messages de haine et les accusations infondées. Si ces discours ne sont pas combattus avec fermeté, ils risquent d’ancrer profondément une culture de méfiance et d’exclusion.
Des pistes pour renforcer l’unité nationale.
Face à cette situation, il est urgent de promouvoir une identité nationale inclusive, qui valorise la diversité culturelle tout en affirmant la primauté de l’appartenance guinéenne. Plusieurs actions peuvent être envisagées :
1. Renforcer l’éducation civique et patriotique, en mettant l’accent sur l’histoire commune et les valeurs de fraternité.
2. Encourager le dialogue intercommunautaire à travers des initiatives locales et des événements favorisant l’échange et la compréhension mutuelle.
3. Créer un observatoire indépendant du vivre-ensemble, composé de sages, de chefs religieux et d’intellectuels non politisés, pour veiller à la cohésion nationale et alerter sur les dérives identitaires.
4. Responsabiliser les médias et les acteurs politiques, en instaurant des sanctions contre les discours haineux et en valorisant les discours rassembleurs.
5. Favoriser le tourisme culturel intra-guinéen, afin que les citoyens découvrent et comprennent les richesses culturelles des autres communautés.
Un sursaut nécessaire.
La Guinée ne pourra avancer que si ses citoyens placent l’intérêt national au-dessus des considérations ethniques. Il appartient à chacun de rejeter les discours de division et d’œuvrer à la construction d’un pays où chaque individu est jugé sur son mérite et non sur son origine.
La responsabilité est collective : autorités, société civile, médias et citoyens doivent s’engager activement pour faire de la Guinée une nation unie et forte. Car au bout du compte, c’est ensemble que nous bâtirons un avenir meilleur.
Abdourahamane NABE
Responsable mécénat santé et solidarité [email protected]