C’était une triste journée pour le monde de la culture guinéenne. Allongée, la dépouille couverte du tricolore national, Mory Djely Deen Kouyaté a reçu les derniers hommages ce dimanche 30 juin 2024 au palais du peuple de Conakry.
La cérémonie a été entièrement prise en charge par le gouvernement guinéen par l’entremise du ministre de la culture, du tourisme et de l’artisanat. Moussa Moïse Sylla a dans son discours de circonstance salué la mémoire d’un grand artiste qui rêvait de retourner dans son pays après guérison pour continuer à léguer sa connaissance à la jeune génération de musiciens.
Nous vous proposons l’intégralité de son discours
Mesdames et Messieurs,
Nous voilà réunis aujourd’hui pour honorer la mémoire d’une figure illustre de notre patrimoine musical, Mory Djely Deen Kouyaté. En ce moment de tristesse partagée, nos cœurs sont lourds alors que nous nous souvenons d’un artiste dont le talent et la passion ont transcendé les frontières nationales pour illuminer la scène musicale internationale faisant bénéficier non seulement la Guinée mais aussi le monde entier de l’aura qui se dégage en lui à chaque vibration de sa voix de stentor.
Je tiens à exprimer mes plus sincères condoléances à la famille endeuillée, ainsi qu’à la communauté culturelle et artistique guinéenne. Au nom du Président de la République, Chef de l’État et Chef suprême des Armées, du Premier Ministre et de l’ensemble du Gouvernement, j’adresse les condoléances les plus profondes à tous ceux qui ont été touchés sa disparition. En ce moment de profonde tristesse, nous partageons votre peine.
Mory Djely Deen Kouyaté, né dans la prestigieuse tradition des griots mandingues, a grandi en portant fièrement cet héritage. Son talent exceptionnel lui a valu le titre de « ténor mandingue », « Bele beleba », témoignage de son dévouement à l’art musical. Dès sa jeunesse, il a embrassé une carrière qui a su transcender les genres, explorant avec brio la musique mandingue, l’afro-pop, l’afro-blues, l’afro-cubain et l’afro-jazz.
Même face à la maladie en 2007, qui l’a conduit au Maroc, Mory Djely n’a jamais cessé de créer et d’inspirer. Résidant en France depuis 2016, il nourrissait jusqu’à son dernier souffle le rêve de retourner en Guinée pour former de jeunes musiciens, un rêve qui continue de vivre à travers son héritage musical.
Aujourd’hui, même face à ce cercueil froid, aujourd’hui même face à ce corps inerte et inanimé, ce n’est pas la mort que nous célébrons, mais la vie . Oui la vie d’un artiste qui a su marier tradition et modernité, portant haut les valeurs de la musique guinéenne. Combien parmi nous ont été submergés et subjugués par la puissance de la voix de Mory Djely Deen Kouyaté, combien parmi nous ont ressenti de fortes émotions et même des frissons en écoutant la mélodie de cet artiste à la corde vocale envoûtante.
L’influence de ce chef griot s’étendait bien au-delà des frontières, véhiculant des messages d’unité, de paix et de fierté culturelle.
Mory Djely Deen Kouyaté appartenait à une lignée d’artistes, rares de nos jours. Il laisse un vide immense, mais il laisse aussi une flamme vivante ; son héritage musical est là et nous devons continuer à l’entretenir.
À sa famille, à ses proches, et à tous ceux qui ont été touchés par la perte immense d’un élément indispensable de notre répertoire musical, nous disons que Mory Djely Deen Kouyaté ne sera jamais oublié. Sa musique continuera de résonner dans nos cœurs et dans notre culture.
Le Président de la République et le Gouvernement assurent leur soutien à la famille en ces moments difficiles.
Le Général Mamadi Doumbouya vous exprime sa solidarité en ces temps éprouvants.
Protecteur des arts et des lettres, le Chef de l’État mesure à juste titre l’importance de nos hommes de culture et les enjeux qui ont trait à la question de la mémoire et à la valorisation de notre patrimoine culturel.
Repose en paix, Mory Djely Deen Kouyaté.
Repose en paix, l’artiste.
Et que vive à jamais ton héritage, car un artiste de ta dimension ne meurt jamais.