Monsieur le Premier Ministre ;
Honorables Conseillers nationaux ;
Mesdames et messieurs les membres du gouvernement ;
Distingués invités.
Cette date du 14 Décembre 2022 ouvre une page décisive de l’histoire de l’application responsable et de la mise en œuvre éclairée de la Charte de la Transition. En effet, la Charte, en répartissant les rôles et missions des organes de la transition, d’une part, en son article 52, prescrit au Premier ministre la charge d’élaborer et de soumettre au Président de la Transition « le plan d’action de la feuille de route du Gouvernement de transition » et indique, d’autre part, en son article 57, que parmi les missions du Conseil National de la Transition figure celle « de suivre la mise en œuvre de la feuille de route de la Transition ».
Si, de manière expresse, la Charte n’impose pas au Premier Ministre l’obligation de prononcer devant le CNT un discours politique, par lequel il expose les grandes orientations de son plan d’actions de la feuille de route du Gouvernement de transition, cependant, elle prévoit explicitement que le suivi de la mise en œuvre de cette feuille de route est une des missions fondamentales du CNT.
Je voudrais noter que vous avez fait, Monsieur le Premier Ministre, une lecture différenciée, correcte et positive des dispositions de cette Charte, en vous engageant à nouer et à jamais affaiblir ou rompre le fil du dialogue avec l’organe parlementaire de la transition, afin que, bâtissant des compromis ambitieux, sans compromission sur les valeurs essentielles de la transition, l’Exécutif et le Législatif, ensemble, dans une communion synergique, cherchent et construisent des solutions concrètes aux défis et aux problèmes qui impactent la vie des populations.
Honorables Conseillers nationaux
Une déclaration de politique générale est un moment de vérité, de partage solidaire des diverses contraintes auxquelles notre Nation fait face quotidiennement.
C’est pourquoi, tous les membres du CNT se joignent à moi, pour vous exprimer une très chaleureuse bienvenue, en cette circonstance solennelle d’une tradition toute républicaine.
En vous adressant aux Conseillers nationaux, vous parlez à la nation guinéenne tout entière, pour lui exposer la réalité de notre pays, de ses craintes, de ses espoirs et de ses perspectives ; d’où le sens de l’action du président de la Transition, depuis le 5 septembre 2021. Telle est notre mission collective, car à l’occasion de toutes les consultations, de toutes les rencontres, au sommet desquels les assises nationales, les populations des villes, villages et campagnes, les guinéennes et guinéens de l’étranger se sont clairement exprimés.
Tous nous demandant d’agir, d’agir autrement et de faire toujours mieux.
Par leur message, ils nous demandent d’assumer, séparément et collectivement, nos responsabilités, de répondre courageusement et objectivement à l’écho de la division, des tensions sociales et des conflits et divergences politiques, signes d’une démocratie morbide, du désespoir de la jeunesse, de la perte de confiance des citoyens dans la capacité de l’Etat et des élites à améliorer les conditions de vie et à poser les bases du progrès et du développement durable.
Ensemble, nous répondrons à cette demande pressante d’action.
Monsieur le Premier Ministre,
En vous traduisant le message de cordialité et de bienvenue, les Conseillers nationaux souhaitent que vous demeuriez assuré, que l’organe parlementaire de la transition, auquel vous allez vous adresser tout à l’heure, repose la collégialité sur les quatre importantes choses que sont : l’écoute, l’action, la volonté de dépassement et les résultats. Elles sont génitrices d’un dialogue citoyen, inclusif, permanent et constructif.
Les Conseillers nationaux prêts à entendre les grandes orientations et actions de votre programme ou feuille de route, les principales réformes et mesures qu’elle contient, les différentes voies que vous entendez emprunter et qui forment la trame de votre plan d’actions, convaincus que nous en partageons les objectifs et les valeurs.
Vos récentes démarches, pour organiser et rationnaliser les assises nationales, témoignent de votre indéniable volition à associer toutes les forces vives du pays, au dialogue renouvelé, visant à inclure toutes les composantes de la Nation, à n’en exclure aucune, afin qu’elles partagent aussi bien les opportunités que les contraintes.
N’est-ce pas le sens de la refondation voulue par le président de la Transition, Chef de l’Etat, Chef suprême des Armées le Colonel Mamadi DOUMBOUYA ?
Dans ce sens, avant d’entendre votre déclaration, nous saluons les efforts de réduction du déficit public à un niveau soutenable, la création et la consolidation des conditions d’une croissance forte et durable, capable de créer des emplois, de poser les fondations d’une rapide émergence, résultant des réformes nécessaires et idoines, des mesures efficientes de bonne gestion et de lutte à outrance contre la pauvreté la corruption et toutes les formes de fraudes.
Nous sommes certains, après l’exercice du débat d’orientation budgétaire, après l’examen de la loi de finances rectificative, les diverses discussions avec les ministères sectoriels à l’occasion de l’adoption de nombreuses lois ordinaires et lois de ratification des accords de prêts, que la loi de finances, en cours d’examen, renforcera l’équilibre de notre budget, auquel le Chef de l’Etat se montre très attaché.
Votre initiative de vous présenter devant le CNT est l’expression sincère d’une volonté patriotique de soutenir l’objectif du Président de la transition, Chef de l’Etat, de bâtir l’Etat de droit et fonder la République de l’égalité ontologique des citoyens, se traduisant par l’engagement de briser les inégalités de destins et de permettre à chacun de choisir librement son avenir.
Pour atteindre cet objectif, nous devons agir ensemble, en inscrivant au premier rang de nos priorités l’école et la jeunesse, et adapter notre action aux situations locales et aux besoins des élèves et de l’environnement social et économique.
L’égalité réelle, nous la construirons dans le dialogue avec toutes les parties prenantes, entre la femme et l’homme, en gardant à l’esprit que chaque discrimination est une humiliation, une blessure, une forme de violence.
Dans ce sens, la subséquence de l’égalité des chances est la réalisation de la cohésion nationale et le renforcement de notre sécurité collective.
Au sujet de la sécurité, la loi de programmation militaire, les multiples formations des membres des forces de défenses et de sécurité, la récente méthode de recrutement, renforcent la confiance des citoyens dans nos forces de l’ordre, pour lesquelles le CNT a le plus grand respect.
Le gouvernement s’efforce visiblement à doter le pays d’une gendarmerie, d’une police républicaine et de sapeurs-pompiers alertes dans les zones urbaines, périurbaines et rurales.
Monsieur le Premier Ministre,
Le grand plaisir de votre constante visite en ce lieu, par dessus tout, celui que procure la cérémonie qui rassemble maintenant, m’amène à rappeler que Monsieur le Président du CNRD imprime une dynamique louable à l’exécution ponctuelle de la loi de programmation militaire, par la modernisation de nos infrastructures militaires et sécuritaires, par un renouvellement massif des équipements, en même temps qu’il lance de grands programmes d’avenir.
Les défis de la Transition sont nombreux. Ils englobent l’insécurité du quotidien, caractérisée par les violences basées sur le genre, par la cyberdélinquance, par les trafics de toutes natures, la multiplicité et la fréquence effrénée des crimes organisés et transfrontalières et par le terrorisme tentaculaire.
Face à cela, Monsieur le Premier Ministre, le CNT vous propose de penser à une loi de programmation pour la Justice, prévoyant le comblement du ratio 1 magistrat pour 10 000 habitants, 2 greffiers pour 1 magistrat et des personnels de justice supplémentaires, afin que soit réalisée une justice plus proche et humaine et que soient réduits ou respectés les délais de procédure, permettant aux juges de se concentrer sur leurs missions fondamentales.
A cela doit impérativement s’ajouter l’édification d’infrastructures judiciaires et pénitentiaires respectueuses de nos lois, de la dignité humaine et des droits de l’homme.
L’article préliminaire de notre Code de procédure pénale pose, en termes éloquents et catégoriques, le principe sacrosaint selon lequel la liberté est la règle, la restriction et les privations de liberté sont l’exception. Ce principe, figurant dans les articles 12 et 13 de la Charte de la Transition et dans les instruments juridiques internationaux des Nations-Unies, de l’Union Africaine et de la CEDEAO, est fréquemment violé. Son respect et son application dans les procédures judiciaires est un critère d’attractivité de notre pays.
L’article 51 de la Charte vous fait obligation d’y veiller ardemment et le CNT vous y exhorte.
Monsieur le Premier Ministre,
A l’issue des séances de questions-réponses avec les Ministres de l’Education, il a été mis en lumière que l’avenir de la jeunesse passe par un enseignement technique et professionnel et par un enseignement supérieur adaptés, soutenu par un programme de recherche disposant de moyens à la hauteur de nos ambitions d’émergence et de développement durable.
L’université et la formation technique et professionnelle sont une chance précieuse pour la République de Guinée. Elles modèlent et aiguisent les esprits. Elles assurent la transmission et le progrès des sciences et technologies dans tous les domaines et sous tous les aspects de la connaissance.
Elles devront donc être au cœur de l’action gouvernementale, en vue d’améliorer les conditions de vie et d’étude de la jeunesse.
Il est, dès lors, impératif de renforcer l’égalité d’accès et de réussite de la jeune fille et du jeune garçon, en particulier dans le cycle universitaire et de la formation professionnelle et simplifier le système de l’ensemble des bourses, avec un accent sur la spécialisation.
C’est l’occasion de saluer l’initiative récente d’investissement dans les sites universitaires et les organismes de recherche et d’exhorter à la continuité de la revalorisation et de la simplification du métier de chercheur et au renforcement de l’attractivité des métiers.
Monsieur le Premier Ministre,
L’adoption au cours de ce mois de décembre de la loi relative à la fonction publique locale est une avancée formidable dans la mise en œuvre de la décentralisation, dans la construction d’une forte relation fonctionnelle avec les communes, fondée sur l’efficacité, le dialogue et l’action, donnant plus de poids aux élus locaux, plus de lisibilité dans leurs compétences, plus de cohérence dans leur action et leurs complémentarités indispensables.
Cette loi donne aux fonctionnaires des collectivités locaux les moyens adéquats de leur action et élargit le périmètre de la modernisation de l’État guinéen.
Monsieur le Premier Ministre,
Le souci des populations et de Monsieur le Président de la transition, Chef de l’Etat, au profit de la sécurité alimentaire, amène le CNT à vous suggérer d’envisager l’élaboration d’une loi d’orientation et d’avenir pour l’agriculture. L’objectif est de faire émerger une nouvelle génération d’agriculteurs et d’accorder un soutien plus intense à l’adaptation de l’agriculture aux exigences de la sécurité alimentaire, de la protection sanitaire et au changement climatique.
Honorables Conseillers nationaux
L’audition du discours de Monsieur le Premier ministre, Chef de gouvernement aujourd’hui, apportera, sans nul doute, la confirmation des idées et opinions dites et répétées par les membres du CNT, lors des différents travaux tant en commissions qu’en plénière.
Nous sommes quasi unanimes que la transition se doit, à travers une vision partagée et un consensus national, de produire des réformes audacieuses, nécessaires à l’édification d’un État résilient, démocratique, fort économiquement et uni dans sa diversité sociale, culturelle et régionale.
Sans vouloir donner une leçon, les membres du CNT sont majoritairement convaincus, qu’à l’exemple d’un édifice architectural, bâtir est d’abord convenir d’un plan, sur le modèle du Programme de Reference Intérimaire (PRI), et de stratégies, à l’effet de mobiliser des ressources humaines, matérielles et financières suffisantes, en vue de consolider un soubassement, fortement ébranlé par des secousses socio politiques et des agressions temporelles. Cette fondation rénovée doit d’être puissamment solide et inaltérablement résistant à l’usure du temps et des agressions intempestives des hommes politiques, grâce à une méthodologie ou une technique rénovée ou adaptée à la modernité et à la pérennité.
Avec un tel soubassement refondé, il devient possible d’élever des murs d’une durabilité pérenne, composés de briques moulées avec des matériaux de bonne qualité et un professionnalisme éprouvé. Naturellement, le moule choisi sera dimensionné, en tenant compte des caractéristiques diverses des différentes régions, préfectures et collectivités locales.
L’élévation sera réalisée conformément au plan et l’ouvrage demeurera jointé, délicatement et indestructiblement, par l’unité, par la concorde et la tolérance, engendrées par le dialogue permanent.
Les institutions démocratiques, imparablement érigées, constitueront les poutres et les piliers, qui supporteront inébranlablement la charpente et la toiture répondant, avec efficience et économie, aux demandes sociales et aux aspirations populaires.
L’ouvrage, symbolisant la nation plurielle guinéenne et les compartiments internes, que sont les régions et collectivités, nous protègent contre les effets de toutes les intempéries et les inclémences de la vie. Il apaise nos tensions, afin que nous y vivions une obligeante convivialité, de siècle en siècle et de génération en générations.
Chemin faisant, nous en réalisons progressivement l’extension, en fonction de la démographie et des exigences sociales, politiques et économiques internes et externes.
Honorables Conseillers nationaux ;
Distingués invités ;
Je suis convaincu que l’inclination de Monsieur le Premier Ministre à s’investir, avec courage et constance, pour l’édification d’un dialogue de renforcement de l’unité nationale, permet de présager, avec certitude, l’ouverture d’une nouvelle page de la transition que le CNT, le Gouvernement et toutes les forces vives de la Nation, en accord avec la CEDEAO, vont s’engager résolument à écrire ensemble.
Veuille Dieu oindre de sa magnificence toutes vos actions en faveur d’une transition réussie et irréversible.
Que Dieu bénisse la Guinée et les guinéens.
Je vous remercie pour votre aimable attention.