Aujourd’hui, tu auras fait corps avec la terre. Aujourd’hui, tu m’auras faussé compagnie, pendant que d’une terre lointaine ma main n’a pas été assez longue pour t’arrêter. Tu auras été obligé de baisser les paupières sans me voir revenir chez nous, sans qu’on ne puisse aller ensemble à Thiâ’nguel, comme on s’était promis.
Parti à jamais, père du silence qui parle et de la parole qui tait. Évanoui, papa de la colère à fleur de peau et du pardon sur chaque frémissement de poil.
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Disparu pour toujours, cœur sur la main et cordes qui lient le sang d’une humanité que seule la mort a pu défier. Yaya Thiâ’nguel, déferlement d’amour, racine à qui Dieu confia la graine qui m’a fait pousser du néant. Yaya comme Yahya de l’arabe qui signifie « la vie », pourquoi a-t-il fallu que la vie perde vie en toi? Pourquoi n’as-tu pas honoré ta volonté de m’attendre, pour que tu me transmettes tes dernières volontés? Aujourd’hui, la terre a recueilli et tout le monde est parti, sans se retourner. Ils sont partis te laissant au milieu d’inconnus. Ils t’ont laissé là, dans le ventre de l’insatiable terre de Guinée qui m’a foutu dehors, sans te demander ton avis. Dors baaba, dors mon héros, dors mon ami, mon complice, mon compagnon de mes jours heureux et mes nuits malheureuses.
Tu me laisses treize petits frères et sœurs aimants et deux mamans résilients. Donne-moi ta force pour que tu sois fier de moi. Insuffle-moi ta générosité pour que jamais ma main qui donne ne se ferme. Parle-moi de ton silence pour que ma parole pèse un peu de ton humanité. Parle-moi, oh oui parle-moi, parce que je tendrais indéfiniment l’oreille pour qu’elle s’abreuve de ta sagesse. Merci baaba. Merci görë, comme tu m’appelais.